- Jour 3 -
Sur les flancs du Vercors
Après le cheminement dans Belledone, ça a été repos dans un très beau gîte de montagne avec récupération dans la piscine. Pas mal du tout ! Mais la nuit m'a paru courte, j'avais la sensation que mes jambes bougeaient toutes seules, je n'ai pas beaucoup dormi.
Le départ ce matin se passe à Grenoble, dans le parc Paul Mistral, devant le palais des sports. Nous sommes pas moins de 600 coureurs avec tous ceux du 160 Xtrem et ceux qui ne feront que l'étape du jour. L'ambiance est là, plutôt sympa.
Malgré la nuit agitée et les deux jours de course dans les mollets, je me sens assez en forme et je parcours les premiers kilomètres urbains sans forcer. Après avoir couru seul une bonne partie de la journée d'hier, le contraste est grand et pas déplaisant de se retrouver au milieu de ce grand peloton bigarré.
Juste à la sortie de la ville, nous entamons la grande ascension qui va nous mener au Moucherotte. Comme la fin du parcours de Belledone, cette première partie dans le massif du Vercors, n'est pas très palpitante. Nous empruntons pour le moment, presque exclusivement des pistes forestières. Le décors n'étant pas le plus motivant, je me concentre sur ma respiration et mon rythme.
Au premier ravitaillement il y a beaucoup de monde, autant coureurs que suiveurs. Ça bouchonne dans les escaliers qui y mènent. Je retrouve Manou perdue au milieu de la foule et m'arrête pour causer un peu et avaler un bout de fromage. Plus la course avance, plus je mange aux ravitos et moins j'ai mal au ventre. Serait-ce une sorte d'accoutumance ?
Bon je ne m'attarde pas trop et donne rendez vous à mon amoureuse à la prochaine étape, Lans en Vercors. C'est reparti dans la pente, toujours dans la même direction, le haut de la crête. A partir de là, le tracé de la course emprunte beaucoup plus de mono-traces et devient plus technique et ludique. Je retrouve plus de sensations « traillistiques ». En même temps, c'est aussi la variété des terrains qui fait que la course est belle et aussi riche en émotions.
La météo est avec nous, de la haut, la vue est encore incroyable. En face, au loin, se profile la chaîne de Belledone où nous étions hier et plus de 1500 en contre-bas, la ville de Grenoble s'étend dans la vallée et joue à cache cache avec les nuages qui viennent caresser la falaise.
Que de vues magnifiques offertes par ces massif. Agrémentés ici par la chaleur des bénévoles et des randonneurs qui nous encouragent à grand coups de cloches et de chansons.
Après ce petit tour d'horizon imprimé dans mes rétines, je m'élance dans la pente en suivant le chemin sur le versant ouest de la Grande Roche St Michel. Le paysage est tout autre. On se croirait au milieu d'une steppe herbeuse avec pour décor, une immense vague rocheuse figée dans le bleu du ciel. C'est tout simplement grandiose.
L'arrivée à Lans en Vercors se fait dans une prairie et plusieurs groupes de gens sont éparpillés ça et là pour nous encourager. C'est très sympa. Manou est là aussi, tout sourire. Je me sens bien, même pas fatigué ! Allé, il faut quand même admettre que les jambes commencent à sentir les kilomètres s'accumuler et surtout ceux qui descendent. Et puis aujourd'hui, on ressent un peu plus la chaleur, malgré les nuages, le soleil est bien là.
Je me pose un peu, rigole avec Manou, refait le plein et repars la fleur aux bâtons. Nous quittons les grands chemins pour revenir à des mono-traces plus techniques. Le décors change encore, j'adore ! Nous entamons maintenant les derniers 500m de dénivelés positifs qui vont nous mener au Pic St Michel à 1856m d'altitude. Là-haut, je crois que la vue est encore plus spectaculaire. Dans ces moments là, mes jambes pourraient me porter n'importe où et j'y trouve l'essence même du trail. Ces sensations incroyables, cette harmonie avec les éléments qui m'entourent, la terre, le ciel, l'espace...
J'entame la descente, euphorique. Ça va vite, c'est bon.
Puis après plusieurs centaines de mètres de descente, pour ne pas subir autant que les deux jours précédents, j'essaye une nouvelle technique de course dite du chamois du Vercors. Je baisse mon centre de gravité en me penchant en avant et utilise beaucoup plus mes bâtons pour me reposer dessus. C'est assez efficace dans cette pente encore une fois assez raide et j'arrive à St Paul de Varce sans trop souffrir. Je suis assez content de moi.
Il ne reste maintenant qu'une petite dizaine de kilomètres à parcourir et 400m de dénivelés positifs et négatifs. Malgré la fatigue qui commence à s'accumuler dans les jambes, je me sens bien et ai encore pas mal d'énergie pour boucler cette étape sans problème. La montée passe facilement et j'avale la dernière descente sur le même mode que la précédente. En revanche, la chaleur nous cueille sur le plat et les deux derniers kilomètres de bitume sont un peu pénibles, mais temps que je peux courir, je cours. J'arrive au gymnase de Vif tout sourires et heureux de boucler cette belle étape en me sentant aussi bien.